vendredi 17 mai 2013

Quand on voit ce qu'on voit...

... Et qu'on entend ce qu'on entend... je suis contente de penser ce que je pense. Vous la connaissez certainement celle-là. Et c'est sur cette note que je souhaite démarrer ma page, car je reçois si souvent, trop souvent le commentaire peu constructif de personnes sceptiques quand à la vie qui me disent: "Quand on voit ce qui se fait en Bio...", ...et c'est tout. Ils n'en disent pas plus.

C'est drôle, je ne vois pas, justement... Ces personnes savent que nous avons passé le cap et que, depuis septembre 2012, nous sommes labellisés! Et ce, malgré les remarques (peut-être justifiées, l'avenir nous le dira) de représentants de la Chambre d'Agriculture du Cantal qui ne croyaient pas en notre aptitude à lancer une exploitation agricole en Agriculture Biologique viable. Pourtant, suite à des mesures mesurées, des calculs longs comme ça, et bien entendu des actions par rapport à notre pratique, nous avons eu la grande joie de recevoir notre Certification en Bio. Bon, cela dit, est-ce pour cette raison seulement que ces personnes nous harponnent pour dire: "quand on voit ce qui se fait en bio..."? - Notre approche et notre perception de l'élevage, nos objectifs, notre sensibilité écologique, tout indiquait que nous participerions à une agriculture autre que celle préconisée par la grande Europe. Mais nous avons dû être imaginatifs pour effectivement faire le pas. Il y a des contraintes, dont une, pas des moindre, et qui motivait certainement les remarques de ladite Chambre d'agriculture, soit la contrainte du financier. Mais je passe ce sujet, très vaste mais pas très sexy. Il y a un autre aspect qui nous a motivés pour être candidat à ce label qui fait tant parler de lui. Une conviction. Celle qui consiste à croire que fondamentalement, notre société va de travers, qu'elle marche même sur la tête. C'est plus fort que nous, et c'est une pensée profondément incrustée dans notre esprit, notre conscience, et qui nous gâche souvent notre petite vie, en quelque sorte. Car c'est lourd de garder les yeux ouverts face à certaines caractéristiques abjectes de notre race humaine. (Ce mal dont je souffre a commencé alors que je pleurais comme une madeleine en regardant un reportage TV sur un ras de marée noire quelque part sur la planète terre, avec des oiseaux embourbés dans une vase gluante et répugnante et de gentils bénévoles courageux qui tentaient de les "nettoyer" avec des résultats ma foi bien pitoyables. J'avais en arrière-plan les paroles d'une amie qui résonnaient et qui m'avait dit comment les pétroliers obtiennent leur licence, et j'ai eu les boyaux tordus depuis, à force de savoir comment on obtient le droit d'agir, mal -. Donc, nous marchons contre le courant majoritaire. En agriculture, la majorité s'inscrit encore dans le productivisme: produire plus, plus vite, et pas cher. Bon, je croche sur le terme "pas cher", mais c'est quand même la tendance. Merci les subventions. Merci les pétroliers. Petit dialogue reproduit pour vous: "dis, voisin, que mets-tu sur ton champ là bas? un produit qui rendra mes céréales plus grosses! ah? et ma paille plus dure et grande. Aah?! Je la vendrai mieux. Et, c'est quoi ce produit? (une grande machine passait, avec de looong bras de chaque côté, déversant un produit x). C'est un insecticide. Ah bon? les insecticides rendent les grains plus gros? La paille plus dure?  Et... qu'est-ce qu'il y a dans ce produit? Boh, c'est important? nooon, dans le fond, non..." Et mes boyaux se sont tordus. Encore. Comme si souvent. Et j'ai pensé aux cailles et aux alouettes lulu qui nichent (nichaient) sur le terrain. J'ai pensé aux hirondelles qui commencent à manquer de nourriture. J'ai pensé aux insectes. Morts. Et j'ai été triste.
 
Nous avons appris ici qu'être en bio, c'est une religion. En tout cas, c'est ce que nous aurions pu déduire, quand certains interlocuteurs nous disent, avec une voix affirmative: "moi, je ne crois pas en la bio". Vous me direz, dans quel contexte? je réponds, ben aucun, vraiment aucun... enfin oui, il y a un élément déclencheur, lorsqu'on nous demande ce que nous faisons dans la vie. Du porc plein air et bio.  Réponse: moi je ne crois pas au bio! ça ouvre le débat non?!! Mais pourquoi, pourquoi diable nous disent-ils cela, à nous? Et maintenant, je demande: mais c'est quoi ce qu'on voit en bio? Et si quelqu'un en bio fait une saloperie, pourquoi ne dit-on pas ce qu'il fait, et qui c'est? Et les conséquences de son acte? Pourquoi ne lui demande-t-on pas à lui de rendre des comptes? Ca veut dire quoi: Quand on voit ce qui se fait en bio? Si un gars me dit ça à moi, est-ce que je dois en déduire que je fais n'importe quoi car je suis en bio? pourrait-il s'il vous plaît étayer sa vision des choses, être un tant soit peu plus précis?

Alors j'ai quand même tenté de savoir ce qu'on lui reprochait, à ce salopard en bio. Et, bizarrement, c'était plus flou. Il a fallu insister. Et j'ai su. Et j'ai encore eu les boyaux tordus. Encore. On lui reproche à ce salopard d'être le voisin d'un mec qui asperge ses terrains avec toutes sortes de produits non-biologiques (de la chimie de synthèse). Et comme il n'y a pas de barrière anti-produits chimiques entre les deux exploitations, le mec bio, ce salaud, il vend des produits bio qui ont été aspergés aussi. C'est dingue.

Puis, puis je me suis dit: peut-être que nous dérangeons. ça demande aux non-bio de la dextérité car ils doivent du coup faire attention aux limites de leur terrain pour ne pas asperger leur voisin bio. Ce serait si simple si nous faisions comme tout le monde. Vouloir des grains plus gros comme tout le monde. Pas de coquelicot ni de bluet dans nos champs de céréales. Du propre. Comme tout le monde. Et tant pis pour les alouettes lulus.

Je finirai sur une petite note sympathique sous forme devinette; je la pompe sur une radio Suisse - que j'écoute toujours assidument - qui ponctue les suites musicales par des petites phrases assassines, dont le but est de nous faire prendre conscience de l'absurdité de notre système et que notre humanité en prend un sale coup. Donc voici la devinette: La production d'un kilo de viande de boeuf est aussi nocive pour le climat qu'un parcours en automobile de .... kilomètres. Qui dit quoi?!!

Bon vent à vous chers lecteurs
Signé: une productrice de porcs plein air ET bio, toute courbaturée à force de nager à contre courant.

2 commentaires:

  1. Oui mais finalement on s'en fiche des mécontents et des non-croyants ! ils ont leurs raisons même si elles sont mauvaises, ma foi, on fait difficilement changer les gens d'avis et surtout pas avec de belles paroles et des longs discours ! faut les inviter ces voisins, ces clients, à visiter votre ferme, ya que ça qui permettra de les convaincre.. et si c'est pas le cas, tant pis pour eux ! foncez les amis ! vous êtes en marche, même si c'est difficile ! vous êtes ensemble, dans un coin magnifique, entourés de cochons qui ont une vraie vie de cochons, qui farfouillent, qui gambadent, qui vivent ensemble... !! vous êtez drôlement forts, de vrais paysans plein de convictions ! je crois en vous et en l'humanité qui va se réveiller ! ceux qui veulent soutenir une agriculture paysanne et manger des produits bons et sains arrivent !! et félicitations pour tout ce que vous avez déjà entrepris et continuez comme ça !! je vous embrasse !

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  2. Félicitations à vous, vous avez fait le bon choix, et un choix courageux!

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